FORMER POUR ENTREPRENDRE

 
AUTEURS
Sébastien KADIO-MOROKRO, Directeur général de Pétro Ivoire
Loïc TRIBOT LA SPIÈRE, Délégué général du Centre d’étude et de prospective stratégique – CEPS
 
Extrait de l’article à paraître dans le prochain numéro de la revue PROSPECTIVE STRATEGIQUE, dédié à l’Afrique (AFRIQUE QUE FAIS-TU DE TES TALENTS)
 
Relever les grands défis économiques, c’est comprendre et agir sur une multiplicité de données qui toutes interagissent entre elles. Il ne peut en effet, y avoir de vraies dynamiques de développement que si elles s’inscrivent dans une logique de durée. La construction et l’entretien des infrastructures de production, de transport (qu’elles soient routières, ferroviaires, portuaires ou aéroportuaires), le maillage et la pérennité énergétiques,[1] la lisibilité des normes fiscales et juridiques, la stabilité des institutions sont autant d’éléments nécessaires et indispensables pour permettre et assurer l’émergence et le développement d’une activité économique durable et prospère. À cet égard il sera intéressant de suivre les expériences d’industrialisation et de diversification entreprises en Côte d’Ivoire, au Maroc, au Sénégal, au Kenya, au Ghana, mais aussi en Éthiopie…
 
Cependant, si ces données sont essentielles, elles ne sauraient être suffisantes, pour assurer et permettre une vraie dynamique de croissance. Aucun projet, qu’il soit industriel, financier ou même scientifique ne saurait donner sa pleine mesure en l’absence de cadres formés et responsables. L’ambition et le succès d’une aventure économique reposent fondamentalement sur la capacité à mobiliser des compétences. Beaucoup de projets d’activités restent bien souvent à un stade informel faute de talents pour les accompagner et les développer. Répondre en formant des cadres supérieurs aguerris, des corps intermédiaires – trop souvent négligés –, est le challenge que doit relever l’Afrique économique.
 
Nous constatons que bien trop souvent les compétences techniques et professionnelles ont été négligées, voire ignorées et que la proportion des diplômés en sciences sociales, en lettres et en sciences humaines reste encore très nettement supérieure aux formations économiques, scientifiques et techniques.[2] La dynamique d’enseignement et de formation supérieure, notamment en sciences économiques et techniques, mise en place au Maroc est un exemple qu’il convient d’étudier et sans doute de reprendre, au besoin en l’adaptant aux contextes locaux. Elle vise à former les cadres, parfois en association avec les grandes écoles de commerce ou scientifiques, pour répondre à des besoins réels et identifiés mais aussi à donner à un certain nombre d’entre eux, les moyens de tenter l’initiative entrepreneuriale. L’objet est également de lutter contre la fuite massive des talents que connaît le continent depuis plusieurs décennies.
 
Parallèlement, un effort plus systématique en faveur de la formation continue permettrait d’actualiser les connaissances des cadres en activité « déclarée », mais aussi à des acteurs du secteur informel qui souhaiteraient évoluer et pouvoir progresser économiquement et socialement. Il conviendrait également de généraliser et vulgariser les séminaires de perfectionnement, d’actualisation des connaissances et de validation des acquis mais aussi de sensibiliser et de former aux technologies numériques notamment pour le corps enseignant.
 
Un tissu économique est toujours à l’image de son système d’éducation et de formation.
 
Chaque entreprise est un corps social en mouvement qui doit à tout instant s’adapter aux évolutions de son environnement. La richesse d’une entreprise repose en grande partie son capital humain. Une société constituée de talents progresse plus que toute autre, mais aussi attire plus facilement les investisseurs. Relever le défi d’une « jeunesse solidement formée » est plus qu’une nécessité, c’est tout simplement une question de bon sens ![3]
 
Ce serait par ailleurs commettre une erreur, de considérer que le junior ne puisse égaler, voire dépasser le senior. La réussite ne doit pas être considérée comme une atteinte au prestige légitime de l’aîné !
 
Le respect se situe à un autre niveau, plus simple et à la fois peut-être plus subtil !
 
 
 

[1] Aujourd’hui en Afrique près de 750 millions de personnes n’ont aucun accès à l’énergie. Cf. « Afrique subsaharienne. Un changement de cap s’impose », Perspectives économiques régionales, FMI, avril 2016
[2] Perspectives économiques en Afrique 2015, Centre de développement, OCDE
[3] Environ 70 % de la population africaine a moins de 30 ans, plus de la moitié a une moyenne d’âge de 21 ans. Mais également, plus de 60 % des chômeurs identifiés sont des jeunes et environ 12 millions de jeunes entrent dans la vie active chaque année. Dans les dix prochaines années, ils seront environ  120 millions de jeunes à entrer sur le marché du travail dans les 10 prochaines années, qui aspirent de plus en plus à des emplois stables et correctement rémunérés. Se résume là les termes du challenge à relever !
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